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Le Karabakh, otage du bras de fer turco-russe

parTigrane YEGAVIAN , chercheur au Centre français de recherche sur le renseignement (C2FR) 

Articles de la revue France Forum

Fallait-il mourir pour Chouchi ?

Peuplée majoritairement d’Arméniens et attribuée arbitrairement à l’Azerbaïdjan en 1921 par le pouvoir soviétique, l’enclave du Karabakh a connu une première guerre entre 1988 et 1994 qui s’est achevée par un cessez-le-feu en faveur des forces arméniennes. La guerre de l’automne 2020 consacre la victoire militaire de l’Azerbaïdjan et de son allié turc. 43 jours, c’est le temps que l’armée azerbaïdjanaise, plus forte en nombre et en armes, épaulée par la Turquie et par près de 2 500 mercenaires djihadistes syriens, a mis pour faire plier une défense arménienne dépassée par la supériorité technologique et la maîtrise du ciel des drones israéliens et turcs. Dans la nuit du 9 au 10 novembre 2020, nikol pachinian, premier ministre d’Arménie, s’est résolu à signer un accord de cessez-le-feu qui contraint les Arméniens à renoncer aux territoires qui constituaient une ceinture de protection autour de l’enclave, elle-même amputée d’un millier de kilomètres carrés et de la symbolique ville de Chouchi, l’ancienne capitale karabaghiote.

Au début des années 1990, les Arméniens étaient parvenus à consolider autour du territoire de l’ancienne région autonome un glacis de 7 000 km², contrôlant les sept districts azerbaïdjanais afin de désenclaver le Karabakh et de négocier l’échange de territoires contre la paix. Côté Azerbaïdjan, cette défaite et la perte de 15 % du territoire national ont attisé un esprit de revanche alimenté par une hystérie anti-arménienne instituée en dogme d’état avec l’arrivée au pouvoir, à Bakou, de Ilham Aliyev, succédant à son père Haydar, en 2003. Grâce à la rente pétrolière, l’armée azerbaïdjanaise a poursuivi inlassablement son réarmement, forte du soutien de la Turquie et des livraisons de drones et de matériel militaire israéliens dans le cadre d’un partenariat géostratégique très étroit entre Bakou et Tel-Aviv.
 

UNE DÉFAITE DIPLOMATIQUE POUR L’ARMÉNIE. Mis en place sous l’égide de l’organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), le groupe de Minsk, coprésidé par les États-Unis, la France et la Russie, n’a pu...

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