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La Chine, plus forte que la pandémie ?

parBernard JOMARD, expert international, entrepreneur

Articles de la revue France Forum

Quand la Chine change de ton et gonfle les biceps.

Depuis l’adhésion de la Chine à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), les propos et communiqués de presse des ambassadeurs ont toujours été d’un ton harmonieux. Cela faisait partie de la stratégie chinoise qui ne voulait pas répéter l’erreur des Soviétiques de vouloir faire des Européens des clones. La Chine, ayant appris sa leçon, se contentait, elle, de vouloir faire de quasiment tous les autres paysses vassaux économiques. Depuis l’épidémie de Covid-19, tout a changé. La plupart des communiqués vantent la force du modèle chinois et dénigrent assez allègrement l’impréparation et l’indiscipline des démocraties occidentales.


LA FIN D’UNE COMMUNICATION HARMONIEUSE. Il est bon de rappeler que le régime chinois connaissait l’existence du virus et sa morbidité dès la fin du mois de novembre 2019. Bon de rappeler aussi que la Chine exporte pour 2 500 milliards de dollars par an dont une partie très significative avant les vacances du nouvel an chinois qui, cette année, tombait le 25 janvier. Il était donc inimaginable après une année 2019 économiquement morose de sacrifier les exportations au motif de sauver des vies.

Cette dissimulation a marqué la fin de la communication harmonieuse. La Chine ayant assimilé le fait que « la meilleure défense, c’est l’attaque », il est devenu décisif pour elle d’exploiter sa pseudo-réussite de la gestion de l’épidémie pour tenter de faire oublier ses dissimulations. C’est à partir de ce moment-là que les premières communications offensives, pour ne pas dire offensantes, sont apparues afin d’imposer des éléments de langage dans les débats publics occidentaux et de montrer à sa dynamique diaspora – souvent assez conservatrice – que leurs pays de résidence avaient de nombreuses leçons à recevoir de la « démocrature » communiste chinoise.

Si la Chine n’a pas copié les Soviétiques dans leur stratégie de faire des Occidentaux des clones, elle a néanmoins copié le modèle de la diplomatie soviétique dont la première stratégie était le rapport de force permanent.

Et cela a fonctionné ! Car cette Chine toujours communiste est devenue au fil du temps incontournable au sein de nombreuses institutions internationales dont l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), etc. L’étape suivante, décidée en 2019, est donc d’occuper l’espace médiatique mondial en critiquant le prétendu suprémacisme blanc agrémenté d’un égoïsme occidental. Un message encore ciblé sur cette invisible et discrète, mais influente, diaspora chinoise souvent victime de racisme.

 

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UNE GUERRE DE PROPAGANDE POUR DÉTOURNER LES REGARDS. Aujourd’hui, en Chine,des millions ou des dizaines de millions de jeunes et de travailleurs migrants ou mingongsqui venaient, dès la fin du nouvel an chinois, dans les grandes villes et trouvaient immédiatement un travail sont sans emploi. Officiellement, le taux de chômage global serait de 6 % et celui des jeunes de 14 %. Mais, selon les rapports des agences financières, le taux global se situerait plutôt autour de 20 %. Enfin, lorsque ces Chinois trouvent un emploi, celui-ci est toujours précaire, sans aucune couverture maladie et avec des baisses de salaire pouvant aller jusqu’à 80 %.

Des études récentes démontreraient que des dizaines de millions de salariés d’hôtels, de restaurants, de commerces de détail et du bâtiment auraient perdu au minimum la moitié de leur salaire en février et en mars. Alors qu’aujourd’hui la consommation domestique contribue à plus de la moitié au produit intérieur brut (PIB), la Banque mondiale prévoit que la croissance ne devrait pas, cette année et pour la première fois depuis la révolution culturelle, être positive. La Chine dont l’objectif était de devenir la première puissance mondiale en 2049, pour le centenaire de la révolution d’octobre 1949, risque donc de « perdre la face ».

Enfin, vu l’endettement du pays et de ses acteurs privés, très supérieur en pourcentage de celui de l’Europe ou des États-Unis, on imagine mal un plan de relance de près de 13 % du PIB comme lors de la crise de 2008.

Un malheur n’arrivant jamais seul, cette pandémie,qui survient après la guerre commerciale américaine, incite de nombreuses entreprises étrangères, dont les japonaises pourtant très présentes en Chine, à quitter le pays. Toutes ces délocalisations vont, bien sûr, inquiéter les consommateurs chinois qui vont être tentés d’épargner beaucoup plus.

Compte tenu de tous ces éléments,les ambassadeurs chinois ont-ils raison d’être de moins en moins diplomates ? Si on regarde la hausse du niveau de vie, la forte baisse de la pauvreté et la modernisation de la Chine depuis trente ans, on serait tenté de dire que cette dernière peutaujourd’hui cesser d’être suiveuse et s’affirmer comme un leader mondial.

Attendons, cependant, 2049 pour constater qui sortira vainqueur de ce bras de fer entre cette démocrature capitaliste adepte du temps long et, nos démocraties adeptes du temps court, et souvent mal armées pour affronter les crises.

 

 

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