Les recompositions françaises

parInstitut Jean Lecanuet
23 Février 2018
Actualité

Depuis 1981, soit trente-sept ans de vie politique, le baromètre Kantar Sofres pour Le Figaro magazine mesure, chaque mois, la manière dont les Français se situent dans le paysage politique.

Ceux-ci doivent, pour ce faire, se positionner sur un axe allant de l'extrême gauche (position 1) à l'extrême droite (position 7), avec une position centrale à 4. À défaut d’être prédictives, ces enquêtes sont une mine d’or pour les analyses politiques sur longue période, dont celle produite par Emmanuel Rivière et Adrien Becassis et publiée dans Le Figaro du 14 février dernier. 

On y voit que des présidents peuvent être de gauche et la France aller vers la droite comme sous François Mitterrand ou François Hollande. Et inversement, bien sûr ; comme sous Jacques Chirac où la France est plus à gauche. Globalement, on comprend que la France passe d’un bloc à l’autre parce qu’elle est vite déçue par son président. Il existe des exceptions, comme lors du quinquennat de Nicolas Sarkozy. La déception est là aussi, mais la France reste, malgré tout, à droite. 

Il est également très intéressant de constater la manière dont le centre s’est d’abord réduit du fait de la forte bipolarité des deux blocs droite-gauche dits de gouvernement, puis a élargi son champ au fur et à mesure que les Français ont commencé à désespérer de cette alternance. Pour que Emmanuel Macron l’emporte en 2017, il aura aussi fallu que cet espace central bénéficie de la fragmentation de la droite et de la gauche du fait d’une polarisation inédite sur les extrêmes. Chaque fois qu’il était en difficulté, François Mitterrand savait à merveille faire progresser l’extrême droite pour affaiblir la droite. Il n’avait pas intégré que ce phénomène de polarisation pourrait, un jour, toucher son propre camp et précipiter l’effondrement du parti socialiste, largement sous la barre des 10 %. 

Cela dit, peu d’observateurs de ce "quadripartisme partisan" auraient imaginé que cette recomposition puisse laisser place à une cinquième force. Emmanuel Macron et son mouvement de marcheurs ont réussi à occuper un espace gagnant à équidistance de ces « deux fois deux blocs », profitant, d'une part, d’un "ni droite ni gauche" en plein essor depuis quelques années et, d'autre part, de l’implosion des deux grands ensembles historiques de gouvernement. 

Rien ne dit que cette polarisation se maintiendra. Si la France Insoumise semble tenir ses positions, et peut d’autant plus le faire que le PS n’a ni leader ni programme, le Front national vit une séquence politique difficile et potentiellement durable. Le nouveau président des Républicains connaît ce nouveau monde politique. Il sait qu’il lui faudra trouver un subtil équilibre programmatique pour défaire la polarité à droite tout en se tenant prêt à accueillir d’éventuels déçus du macronisme.

 

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